Le Cementerio de Nuestra Señora de la Almudena est le cimetière principal de Madrid.
Sa surface d'environ 120 hectares en fait le plus grand cimetière d'Espagne, mais le range aussi dans la catégorie des plus grandes nécropoles d'Europe. Environ cinq millions de personnes y sont enterrés.
Notre-Dame de la Almudena
La nécropole madrilène doit son nom à la sainte patronne de la ville « La Vierge de la Almudena » qui est célébrée le 9 novembre et dont la statue se trouve dans la cathédrale de la Almudena.
Son origine prend naissance dans les conquêtes arabes de la ville et son nom viendrait du mot « al-Mudayna » qui désigne une citadelle, ici l'ancienne médina musulmane de Madrid aujourd'hui disparue. L'image de la vierge serait apparue sur ses remparts.
Un peu d'histoire
Les lieux furent ouverts en 1884 pour répondre aux nouveaux usages funéraires apparus à la fin du 18éme siècle de placer les cimetières hors des villes. Il ne fut cependant inauguré qu'en 1925. La première inhumation, un bébé de 14 mois, eut lieu le 13 septembre 1884. Sa tombe devint la seule sépulture éternelle du cimetière, selon la volonté du roi de l'époque Alphonse XII.
Le cimetière a aussi été le témoin d'exécutions qui se sont produit lors de la Guerre Civile Espagnole et par la suite sous la dictature franquiste (on estime que prés de 2 500 prisonniers ont été assassinés entre ses murs).
L'entrée majestueuse
L'entrée du cimetière est particulièrement grandiose et imposante, avec son portail composé de grandes arches et de colonnes décorées. Elle mélange les styles Art Nouveau et Néo-Mudéjar (typiquement espagnol dans un esprit mauresque).
Le mot ange vient du grecque "agellos" qui signifie "messager", il est un intermédiaire entre Dieu et les humains. Dans les cimetières, l'ange est là pour protéger et accompagner l'âme vers les cieux.
Selon sa posture, son geste ou ses accessoires, il peut avoir une signification plus précise et symbolique : s'il porte un livre, son rôle sera celui d'un scribe témoin d'une histoire ; ses ailes dépliées signifieront son envol avec l'âme du défunt ; s'il pleure, il symbolisera le deuil, s'il prie ou s'il entoure une croix la foi religieuse ; s'il porte une couronne il sera synonyme d'éternité dans les mémoires ; s'il porte une palme, il représentera un martyr et des fleurs l'aspect éphémère de la vie.
Ici, il y a un ange remarquable à la légende inquiétante.
Une fois passé l'entrée principale, vous avez devant vous une gigantesque chapelle, imaginée par l’architecte Fernando García Nava qui a aussi conçu le portail. A son sommet se trouve un ange à l'allure austère appelé Faust ou de son petit nom : l'ange exterminateur.
La trompette que porte cet ange est sujette à beaucoup de fantasmes. On raconte que si on l'entend sonner cela peut signifier que vous allez perdre un proche ou que vous allez mourir. On dit aussi que cet ange buccinateur (annonciateur, car portant une longue trompette) proclamera le début de l’Apocalypse. Dès qu'il se mettra debout et sonnera, les morts se lèveront pour le Jugement dernier.
La croyance est tellement tenace que lors de sa restauration, il y a quelques années, on aurait déplacé la trompette qui était prés de sa bouche pour la placer sur ses genoux. Je suis assez septique sur ce point au vu de la position de ses mains et je n'ai hélas pas trouvé de vieille photo de l'ange qui pourrait prouver ce changement. Encore une légende ?
Les Chats
Comme dans de nombreuses autres nécropoles, on retrouve ici une colonie de chats paressant au soleil.
Le chien
J'ai remarqué sur une tombe cette statue de chien assez adorable.
Ce symbole de la fidélité se retrouve parfois sur les sépultures. En souvenir peut-être d'un compagnon poilu ? Ou en image du gardien attendant éternellement le retour de son maître ? Cette figure est assez ancienne, car on la retrouve aux pieds de nombreux gisants médiévaux.
Les arbre en fleurs
Nous avons eu la chance de venir alors que les arbres étaient en fleurs, donnant ainsi une vision enchanteresse des lieux.
Les statues religieuses
De nombreuses statues religieuses ornent les sépultures : Vierge à l'enfant, Pieta, religieuse et religieux et bien sur le Christ. Elles témoignent de la foi des défunts et de leurs familles.
J'ai remarqué que de nombreuses « Vierge » tenaient une sorte de sac/pochon. Je n'ai pas réussi à trouver la signification.
Les Niches vitrées
Sur de nombreuses tombes, se trouvent des petites niches vitrées qui contiennent divers objets : statues religieuses, fleurs artificielles, ou bien encore des photographies des défunts.
Cette tradition est assez répandue dans les cimetières espagnols, notamment pour décorer des cases funéraires.
Les tombes en brique
Un coin du cimetière possède de nombreuses tombes délimitées par une rangée rectangulaire de briques dans un très mauvais état. Elles semblent correspondre à des tombes modestes qui n'ont pas pu être entretenues correctement.
On remarque que l'espace central de ces tombes est soit recouvert d'une dalle, soit en pleine terre comme les tombes végétalisées plus moderne.
Les chapelles
Sur les hauteurs
Au milieu du site, on retrouve une sorte de colline qui offre une vue dominant la ville et les tombes alentours. Cet espace est entouré d'un haut mur qui contient des niches en brique destiné à accueillir des dépouilles.
Les pleureuses
Les pleureuses sont le symbole du chagrin inconsolable et du deuil.
A l'origine, il s'agissait de personne en chair et en os qui venaient pleurer de manière démonstrative aux funérailles. Elles pouvaient être rémunérées par la famille et être une vraie profession. Leurs origines remontent à l’Égypte Antique et elles existent encore aujourd'hui.
Elles sont devenues très courantes en sculpture à partir du 19éme siècle. Elles ornent les tombes et sont le témoignage de la douleur de la famille du défunt. Elles sont plus ou moins démonstratives en fonction de leurs postures. Elles peuvent aussi être associées à une croix et à l'image de la Pieta et de la Mater Dolorosa.
La représentation de leurs corps souvent dénudés et les jeux de drapés très sensuels dévoilent un autre aspect étonnant : leur érotisation à la manière d'Eros et Thanatos, à la fois pulsion de vie et pulsion de mort.
Au cimetière de la Almudena, elles sont très chastes, très habillées et très religieuses.
Les portraits funéraires
Le « portrait » funéraire est une pratique très ancienne. On peut par exemple penser aux magnifiques portraits peints des momies du Fayoum, les gisants de pierre, les statues ou médaillons sculptés et bien sur les fameux portraits photographiques en porcelaine si répandus dans nos cimetières.
Gardez une image du défunt sur sa dernière demeure est une préoccupation courante qui a pris différentes formes. Mais la plupart du temps, ils concernaient des personnes de hauts rangs et riches et leurs représentations étaient un mélange de réalisme et d'idéalisation.
L'invention de la photographie allait changer la donne.
Avec l'arrivée du cimetière moderne au 19éme siècle, les tombes individualisées et les rituels très démonstratifs du deuil amenèrent de nouvelles pratiques. Les tombes devaient parler du défunt et de la dévotion des vivants. Bien sûr, cela concernait encore les gens les plus aisés, mais cette pratique se démocratisa petit à petit.
Dans les années 1880, apparut la technique du vitrail photographique qui permit d'avoir des portraits en couleurs des morts, mais sa réalisation était encore coûteuse. Puis vint le médaillon photographique sur céramique, beaucoup moins cher qui permit au plus modestes de pouvoir enfin rendre hommage à leurs chers disparus.
Le portrait photographique est toujours utilisé de nos jours, mais de l'image figée et un peu conventionnelle, une autre iconographie plus spontanée et j'oserai dire « vivante » a vu le jour et où la personnalité, les métiers et autres passions du défunt peuvent apparaître, rendant ses images encore plus émouvantes.
Dans tous les cas, elles sont un témoignage des usages de leurs époques : coiffures, habillement, poses, etc. Elles ont aussi cette force de nous faire voir le mort de son vivant, rendant ces tombes moins anonymes.
Les plaques
J'ai beaucoup aimé ses plaques aux polices « vintages » qui sont, je trouve très graphique avec leurs jeux de taille, de procédés typographiques et de nuance colorée.
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