Lieux funéraires de l'Ile d'Aix / Charente-Maritime / France

 
Outre le cimetière, l’île d’Aix possède d’autres lieux funéraires, parfois surprenant, surtout pour une aussi petite île.
J’ai découvert cela sur un groupe Facebook de l’île, où un monsieur recherchait des informations sur un cimetière privé. 
Il avait accumulé quelques documents et fait des recherches mais ne pouvait se rendre sur l’île lui-même. On a donc joué les apprentis détectives sur l’île et trouvé quelques réponses notamment grâce un ancien maire qui a bien voulu nous renseigner et qui m’a fournis beaucoup d’anecdotes.
J'ai aussi plongé dans les livres et les sites internets pour reconstituer cette histoire d'os.


Il y avait d’abord la présence de croix sur des vieilles cartes
En réalité aujourd’hui elles ont disparues mais nous avons bien trouvé une croix en pierre à l’extrémité nord de l’île mais elle a été posé récemment en souvenir de la comtesse qui vivait là.
 
Près de cette zone, au lieu dit « Les Ormeaux » il y a eu un monastère de l'ordre des Bénédictins (détruit par des invasions vikings au IXe siècle). Apparemment il y a 50 ou 60 ans quand des maisons ont été construites à son emplacement, des gens auraient retrouvé des ossements et s’en seraient même servi pour consolider un échafaudage. 

Plus loin, lors de la construction du Fort Montalembert (Fort de la Rade aujourd'hui), on trouva des sépultures romaines.
 
En 1822 on trouva même un sarcophage datant de l'âge de fer et contenant deux squelettes et une épée .
 
L'île ayant un passé militaire et de défense très important, il exista des cimetières pour les militaires et marins morts sur l'île. Il y aurait eu un à côté de la chapelle du Fort d'Aix au début du XVIIIe siècle appelé le "cimetière des étrangers". Au siècle suivant se serait au niveau de la place Austerlitz qu'ils furent inhumés.

 Lors de la restauration de l'église en 1971, on a retrouvé les vestiges de l'ancien cimetière paroissial (les pierres tombales survivantes sont désormais dans le cimetière de l'île). Il y avait notamment des tombes chaulées qui pourraient correspondre à une épidémie de peste en 1582.


En matière d’ossement les habitants de l’île en connaissent donc un rayon et cela depuis longtemps. 
Laissez moi vous raconter l’histoire des os des prêtres que l’on trouvait dans le sable.
 
En 1793 l'Assemblée Nationale vote une loi de déportation des prêtres n'ayant pas prêtés serment à la Convention. 
Rassemblés au port de Rochefort en 1794 ils sont emprisonnés dans deux anciens navires négriers appelés "Les deux associés" et "Le Washington". Les bateaux iront mouiller dans la rade de l'île d'Aix en attendant un départ vers la Guyane qui ne viendra jamais.
 Ils sont 829 à tenter de survivre, entassés les uns sur les autres dans des conditions de détentions effroyables et 547 succombèrent aux Pontons de Rochefort.
 
On se débarrassera dans un premier temps des cadavres en les jetant à la mer (que l'on retrouvait ensuite en état de putréfaction), puis en les enterrant sur la plage de Tridoux à l'île d'Aix ou sur l'île Madame pour des raisons sanitaires.
Les os des 226 prêtres furent retrouvé dans le sable lors de la construction des batteries et furent déplacé dans les remblais protecteurs de l'île. On décida ensuite que tout nouvel ossement retrouvé serait placés dans la crypte romane de l'église du village. 
Depuis 1971 ils sont sous la dalle de l'autel dans l'ossuaire.
 
Il existe également un calvaire commémoratif dans le village.
 
 
La Déportation des Acadiens par Henri Beau, 1900
 
L’île d'Aix fut aussi une terre d'accueil pour quelques réfugiés acadiens au XVIIIe siècle lors du "Grand Dérangement"
L'Acadie était une région canadienne colonisée par les français au XVIIe siècle. Elle finit par tomber entre les mains des Britanniques qui organisèrent par la suite la déportation des colons français dans des conditions difficiles. 
Certains arrivèrent dans le port de Rochefort en 1758 dans un état déplorable et furent envoyé sur l'île d'Aix pour ce faire soigner. Épuisés par se voyage éprouvant, plusieurs ne survivront pas et seront inhumés sur l'île
D'autres, plus chanceux, finiront par s'installer sur place et par entrer dans l'histoire des familles de l'île.
 
L'embarcadère du port fut baptisé "Quai de l'Acadie" et une plaque commémorative rappelle cet événement.


Qui pourrait deviner que derrière ce portail blanc se trouve un petit cimetière privé? Le voilà l'objet de notre recherche: le cimetière familial Giraud qui a été utilisé entre 1880 et 1902 .
Le lieu a été confié à la municipalité et se trouve accolé au jardin d'un particulier. Une dame de l'île a la charge de son entretien.
J'aurai beaucoup aimé le visiter.

Les photos appartiennent à Monsieur Gouvernal qui m'a autorisé à les publier (un grand merci à lui).
Elles datent de 1994 et ont été prise par un de ses cousins éloignés qui était affilié à cette famille de l'île. Celui-ci était gendarme sur l'île lors de l'emprisonnement de Ahmed Ben Bella.
 

Je comprend maintenant pourquoi on dit que l'île est un vaste ossuaire, j'imagine maintenant des os partout sous nos pieds.
 
Un  grand merci à l'ancien maire monsieur Chaudet qui m'a gentiment reçu chez lui pour me conter de nombreuses anecdotes funéraires de l'île et merci à monsieur Gouvernal pour les photos et pour avoir partagé sa recherche.

Sources: 
  • Histoire de l'Île d'Aix de Pierre-Antoine Berniard, Editions J.-M. BORDESSOULES, (2006)
  •  Petite Histoire de l'Ile d'Aix du Docteur E.Garnier, Editions PyréMonde, (1909 / 1ere édition)
  • Guide de la France Mystérieuse, Collection "Les Guides Noirs",  Editions Princesses (1976) 
  • L'île d'Aix "L'Impériale", de Jean Privat, Editions Mélusine - La Rochelle (1972 / 1ere édition )
  • Sur les réfugiés acadiens: 
  1. Inventaire des lieux de mémoire de la Nouvelle-France 
  2. Grand dérangement  
  •  Sur les prêtres déportés:
  1. PRÊTRES DÉPORTÉS sur les PONTONS DE ROCHEFORT durant la RÉVOLUTION FRANCAISE
  2. Pontons de Rochefort
  3.  1794 - Un prêtre de Saintes raconte son calvaire sur les pontons de la rade d’Aix

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